samedi 17 novembre 2007

DIPLOMATE EXPERIMENTE

Ban Ki-moon, un «rond de cuir» après Kofi Annan
L'élection à la tête de l'ONU de ce diplomate sud-coréen intervient le jour où Pyongyang procède à son essai. Par Odile BENYAHIA-KOUIDER LIBERATION QUOTIDIEN : Mardi 10 octobre 2006 - 06:00
Ces derniers mois, le ministre sud-coréen des Affaires étrangères, Ban Ki-moon, a eu recours à un argument choc pour justifier sa candidature au poste de secrétaire général de l'ONU. «Mon élection, expliquait-il, pourrait faciliter le dénouement pacifique et rapide de la crise nucléaire nord-coréenne.» Hier, le favori à la succession de Kofi Annan, 68 ans, qui quittera son poste le 1er janvier, a été élu à la tête des Nations unies quelques heures seulement après que la Corée du Nord a semé la terreur en procédant à son premier test nucléaire. «Cela aurait dû être un moment de joie. Mais au lieu de cela, j'ai le coeur vraiment lourd», a déclaré le nouveau secrétaire général. «Les deux événements sont étroitement liés, estime Karoline Postel-Vinay, chercheuse au Ceri (Centre d'études et de recherches internationales). Le régime communiste de Pyongyang redoute que l'arrivée de Ban Ki-moon à l'ONU modifie la politique sud-coréenne.» Alors que le gouvernement sud-coréen était, jusqu'à présent, plutôt favorable à la politique de la main tendue envers la Corée du Nord, les Etats-Unis sont adeptes d'une politique très ferme. Or Ban Ki-moon, dont la candidature a été poussée par l'administration Bush, est considéré comme un «grand ami» des Etats-Unis.
Connaisseur. Diplômé de la très réputée Kennedy School of Governement de l'université de Harvard, Ban Ki-moon qui a fait toute sa carrière dans la diplomatie, a été envoyé à deux reprises comme ambassadeur aux Etats-Unis en 1987 et en 1992. Le «vétéran» de la diplomatie sud-coréenne, jusqu'alors peu connu du public, est avant tout considéré comme un excellent connaisseur des rouages onusiens. Premier secrétaire de la mission sud-coréenne auprès de l'ONU de 1978-1980, il fut le haut représentant de la Corée du Sud auprès de l'ONU (2001-2003). Période durant laquelle il dirigea le cabinet du président de la 56e Assemblée générale de l'ONU. Affublé, en Corée, du surnom de «chusa» («rond de cuir»), Ban Ki-moon, marié et père de trois enfants, cultive une allure réservée et modeste. Certains lui reprochent son manque de charisme, et une douceur assimilée à de la faiblesse. Il n'aura évidemment pas la «flamboyance» du Ghanéen Kofi Annan. «Mon style de leadership est soft, reconnaît Ban Ki-moon, mais lorsque c'est nécessaire, je sais élever la voix.» Un bien grand mot. Durant l'été 2004, Ban Ki-moon venait de passer plusieurs heures à négocier vainement la libération du traducteur sud-coréen Kim Sun-il, enlevé en Irak (et finalement décapité), quand il a été pris à partie par un journaliste au sujet de sa passivité envers l'otage. «Le visage de Ban est devenu tellement rouge de colère que nous avons pensé un moment qu'il allait exploser , a raconté un témoin de la scène. Il a repris son souffle, et a répondu avec la même voix douce et contenue que d'habitude.» Cette maîtrise de soi explique sans doute pourquoi Ban Ki-moon a battu les records de longévité aux Affaires étrangères. «Il est incontestablement doué d'une grande plasticité, estime Karoline Postel-Vinay. En trente-six ans de carrière, il a traversé tous les régimes militaires sud-coréens. Et appartient aujourd'hui au cabinet le plus ouvertement nationaliste et antiaméricain qu'il y ait jamais eu en Corée du Sud.» Cela ne lui a nullement porté préjudice. A Washington, on loue sa «puissance de travail», son «opiniâtreté» et son côté «non-partisan» .
Lobbying de Séoul. D'après la loi des rotations, c'était au tour du continent asiatique de présenter un candidat à l'ONU. Adjoint de l'actuel secrétaire général, Kofi Annan, l'écrivain indien Shashi Tharoor, personnage beaucoup plus exubérant que Ban Ki-moon, s'était lui aussi porté candidat. Mais la Chine n'aurait jamais donné son aval à un pays aussi important que l'Inde. Onzième puissance économique mondiale, la Corée du Sud joue ces dernières années un rôle de pivot entre les géants que sont le Japon, l'Inde et la Chine. Séoul a d'ailleurs fortement soutenu la candidature de son ministre des Affaires étrangères. Menée de façon très professionnelle, la campagne de Ban Ki-moon a toutefois suscité de vives critiques. Plusieurs médias, dont le Times, l'ont ainsi accusé d'avoir profité de sa position pour tripler ses promesses d'aides au développement des pays Africains par trois pour atteindre 100 millions de dollars en 2008. La Tanzanie, qui possède comme par hasard un siège permanent à l'ONU, aurait ainsi profité de ces largesses. Pour la Corée du Sud, cette nomination est d'une extrême importance. Ban Ki-moon sera le second homme politique sud-coréen de stature internationale, après l'ancien président Kim Dae-jung (1997-2003), élu prix Nobel de la paix 2000 pour son travail de réconciliation avec la Corée du Nord.

Bienvenue au Pays du Matin calme !

L'Afrique et la Corée du Sud ont des similitudes historiques et sociales. La Corée peut être une source d'inspiration pour les pays africains. Se développer en s'adossant sur ses valeurs culturelles, tel est le pari réussi par le "Pays du matin calme."